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Retours de terrain favorables pour la betterave fourragère

Assolement. Dans l’Aveyron et les départements limitrophes, des éleveurs cultivent chacun 2 ha/an en moyenne, soit 1 ha pour 30 vaches pendant quatre mois d’hiver, à raison de 3 kg de MS/vache/jour.d. Gremy / GFA

Fourrages. Les rendements de la betterave fourragère ont pâti de la sècheresse. Mais le retour des pluies et le redoux ont permis à la plante de produire de la matière sèche en arrière-saison, avec des teneurs en sucre au rendez-vous.

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Depuis l’hiver 2018-2019, les techniciens de l’ULM (Union laitière de la Meuse) animent un groupe d’une quinzaine d’éleveurs utilisateurs de betterave fourragère. Pour les travaux de mise en culture et de récolte, ils peuvent s’appuyer sur l’un des membres également entrepreneur (établissements Andrieux).

En cette année très sèche, les rendements observés vont de 40 à 45 t brut/ha et exceptionnellement plus de 50 t, soit 7 à 9 t de MS/ha. Les premières analyses révèlent des teneurs en MS de 17  %, avec 13  % de sucre et des valeurs alimentaires de 1,15 UFL/kg MS en moyenne. « Les bonnes conditions de récolte d’octobre ont permis de rentrer des racines propres et l’ensoleillement d’arrière-saison a contribué à une bonne teneur en sucre, analyse Lionel Vivenot, conseiller ULM. Dans les petites terres du sud du département, la campagne est marquée par le coup de sec précoce du printemps. Il a conduit un tiers du groupe à ressemer des bouts de parcelle où la plante a mal levé. »

Jusqu’à 57 tonnes/ha dans la Meuse

C’est le cas de Gaël Jacquin, à Menil-sur-Saulx. Après avoir semé 6 ha dans des sols argilo-limoneux­ lors de la deuxième quinzaine d’avril, il a dû semer de nouveau près de la moitié de la surface début juin. « Après la germination, des ronds entiers ont crevé en raison du sec. Nous avons alors pris le risque de désherber des carrés de parcelles et de ressemer. Avoir des betteraves à différents stades a retardé le désherbage, entraînant un peu de salissement par les chénopodes et le liseron. » Malgré une sécheresse qualifiée d’« exceptionnelle », l’éleveur a récolté 57 t brut/ha (95 tonnes en 2021) d’un mélange de variétés sucrières-fourragères. « En été, la betterave montre une résistance étonnante. Elle parvient à conserver de la verdure pendant les périodes de sec, en puisant dans ses réserves racinaires. Puis la culture repart dès le retour des pluies. Au final, les racines sont un peu plus petites cette année, mais elles sont bien hachées dans la mélangeuse et croquées sans difficulté par les vaches à l’auge. »

Entre 10 et 12 t de MS dans l’Aveyron

Dans l’Aveyron, depuis 2018, un groupe d’éleveurs s’est organisé en Cuma pour développer la betterave. Ils sont aujourd’hui plus de 40 adhérents de cinq départements, regroupés autour d’un service complet : semis, binage, récolte, pour un total de 80 ha semés chaque année. Depuis deux ans, le groupe mise sur la variété Summo (KWS Momont), riche en MS et adaptée aux régions froides et aux récoltes précoces. « Nous l’avons conservée, car elle a une bonne vigueur au démarrage dans nos régions d’altitude et s’avère peu sensible à la montée en graine », explique Patrick Couderc. Profitant de températures clémentes, l’éleveur, installé à Moyrazès, entamais seulement le ramassage des pourtours de sa parcelle de 2 ha début novembre. « Avec des températures de 16,17 °C, la plante continue de faire de nouvelles feuilles et la racine de pousser. Je ne suis donc pas pressé de récolter, d’autant que cela n’a pas d’impact sur la valeur alimentaire de la betterave. » Chez lui, la culture, implantée tardivement fin mai dans des terres lourdes, n’a bénéficié d’aucune précipitation en juillet et de 20 mm en août. « Heureusement, les pluies de septembre, octobre ont été très bénéfiques. Même si le rendement est en recul, je sais pouvoir compter sur un fourrage qui fera toujours 1,10 à 1,15 UFL/kg de MS. » Le rendement est ici évalué entre 10 et 12 t de MS/ha, à 20  % de MS (16 t en 2021). Un résultat à mettre en balance avec les 7 t MS/ha du maïs ensilage.

Baisse de rendement mais UFL présentes

Un peu plus au nord, Mathis Caumel, à la tête d’un troupeau de 95 laitières brunes et holsteins à Saint-Saury (Cantal), a semé 2,5 ha pour la première année. Son objectif : distribuer 2 kg de MS/vache/jour de novembre à mi-mars. « Nous avons décidé de cultiver la betteraved’abord pour des raisons de santé, précise-t-il. C’est la seule culture qui puisse assurer un apport de fourrages frais jusqu’à la mise à l’herbe, sans mobiliser beaucoup de surface. Compte tenu des conditions météo extrêmes, je suis très satisfait de ce premier essai. Même si le rendement est pénalisé par le sec, les UFL seront au rendez-vous. C’est le point fort de la culture, comparé au maïs. » Ici, avec moins de 20 mm de précipitations en juillet, puis en août, l’éleveur estime le rendement entre 7,5 et 9 t de MS/ha (entre 40 et 50 t brut). Précisons que la plante a bénéficié de bonnes conditions de levée. Au semis, l’éleveur a fait un premier désherbage, suivi de deux rattrapages, auxquels il faut ajouter deux traitements contre les altises. « La betterave demande beaucoup d’attention pendant le premier mois, le temps de couvrir le sol. C’est pourquoi il était important pour nous de bénéficier de l’expérience du groupe. »

Pâturée fin août dans le Pas-de-Calais

Dans le Pas-de-Calais, à Saint- Inglevert, chez Mathieu Crépin, la betterave est dans l’assolement depuis plusieurs générations. Le 10 novembre, la récolte n’avait pas commencé. Le rendement dans des sols argilo- et limono-calcaires portants et profonds est évalué à 120 t brut/ha et les tests de matière sèche affichaient des teneurs de 17  %. « La hausse du prix des pulpes relance l’intérêt pour cette culture qui a aussi une grande résistance au sec, observe l’éleveur. Compte tenu de l’absence de pluie en juillet, août, les racines seront plus petites, mais aussi plus riches. La culture a profité du retour des pluies début septembre pour repartir, et le rendement devrait être aussi bon, voire meilleur, que les années précédentes. D’habitude tout est récolté le 1er novembre, mais vu les températures élevées pour la saison, je préfère attendre un peu pour éviter que le silo ne chauffe. » Pour la première année, il a semé une variété à pâturer (KWS Momont) selon le même itinéraire technique : un semis le 13 avril, suivi de trois désherbages, un binage et un fongicide. Elle a été pâturée par les 70 vaches à partir du 28 août, à raison de 1m²/vache/jour. « En déplaçant le fil avant de 1 m/jour, j’ai gagné 1,5 point de TP et 3 points de TB. Je suis très satisfait de cet essai. En conditions très sèches où les prairies étaient encore grillées, le pâturage a assuré l’apport d’un aliment frais permettant de faire des économies de stock. Je renouvellerai donc l’expérience dans l’idée de démarrer le pâturage à partir du 15 août. »

Jérôme Pezon

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